Publié le 16 Août 2018 à 16h07 par Star
Le Sunday Times a affirmé la semaine dernière que le Qatar aurait mené des opérations d'influence pour attaquer les candidatures rivales des Etats-Unis et de l'Australie en vue d'obtenir l'organisation de la coupe du monde en 2022. Des accusations qui s'inscrivent dans une longue tradition d'hostilité de la part des médias du groupe de presse du magnat australien à l'égard de Qatar 2022. Une histoire de gros sous ?
On le sait, les médias de News Corporation font rarement dans la dentelle. Le groupe de presse le plus influent du monde est très marqué à droite et ne s'en cache pas : de Fox News aux Etats-Unis, au tabloïd The Sun en Grande-Bretagne, en passant par une myriade de journaux et de stations de télévision ultra-conservatrices, c'est une véritable machine de guerre au service de l'idéologie et des intérêts de Rupert Murdoch.
Idéologie et intérêts. Dans un sens ou dans l'autre. Car le milliardaire australien mêle volontiers ses engagements politiques et la défense des intérêts de son groupe. Et la cabale de News Corporation contre le Qatar semble s'inscrire dans cette logique. Depuis l'annonce de la candidature qatarienne en 2010, les polémiques contre le projet Qatar 2022 se sont empilées à une vitesse record... quasiment toutes en provenance de médias détenus par Rupert Murdoch.
Pourquoi tant de haine ? Pourrait-on imaginer une relation de cause à effet avec les ambitions grandissantes de la chaîne sportive qatarienne Bein Sports (détenue par le fonds souverain du Qatar) qui taille des croupières depuis plusieurs années aux chaînes du groupe News Corporations (notamment Fox Sports aux Etats-Unis) dans l'obtention des droits télévisés du sport en général, et du football en particulier ? Une concurrence mondialisée puisque Bein Sports engrange les droits y compris aux Etats-Unis.
Bein Sports, une chaîne propriété du Qatar, qui investit à fonds perdus dans le sport avec pour objectif à moitié avoué de liquider la concurrence en payant le prix fort pour diffuser les événements sportifs majeurs, avec en tête de gondole les grands championnats européens, la ligue des champions et évidemment la coupe du monde de football.
Une lutte à mort que Rupert Murdoch pourrait donc être tenté de mener au-delà du seul champ économique, au travers d'une campagne hostile à l'égard du Qatar. Cette hostilité pourrait être encore exacerbée sur le court-terme par l'organisation par le Qatar de l'édition 2022 de la coupe du monde de football, comme le révélait récemment Roy Greensdale du quotidien britannique The Guardian.
Qatar 2022 va en effet apporter une innovation majeure au calendrier du Mondial. En raison des conditions climatiques extrêmes du pays, la compétition a été déplacée du mois de juin au mois de décembre 2022. Un changement de calendrier lourd de conséquences pour Fox Sports, l'une des locomotives économiques de News Corporation.
Aux Etats-Unis, la période estivale est considérée comme creuse pour les diffusions sportives (la plupart des grands championnats étant terminés ou pas encore commencés), mais la fin de l'automne et le début de l'hiver, sont les plus chargées. C'est au cours de ces quelques semaines que les chaines spécialisées réalisent leurs plus grosses audiences entre football américain, basket-ball et hockey sur glace.
La tenue de la coupe du monde de football (dont Fox ne possède pas les droits) va être une catastrophe pour les audiences du groupe qui craint de voir des millions de téléspectateurs fuir ses ondes pour regarder de façon quasi-exclusive la plus grande compétition sportive du monde. Un manque à gagner considérable en termes de revenus publicitaires que Rupert Murdoch pourrait être tenté d'éviter en minant au préalable la compétition au Qatar.
