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Supporters PSG : Le policier demande pardon mais assume

Publié le 06 Février 2007 à 16h05 par Ludovic FRANCISCO
Supporters  PSG : Le policier demande pardon mais assume
Deux journalistes du "Parisien" sont partis à la rencontre d'Antoine Granomort, le policier impliqué dans la mort de Julien Quemener, le 23 novembre dernier aux abords du Parc des Princes. Voici les moments forts de cette interview.

Le gardien de la paix de 32 ans a aujourd'hui repris son travail. "Je retravaille depuis le 26 janvier au Service régional de police des transports. J'étais pressé de reprendre. Mes collègues et ma hiérarchie me soutiennent. J'ai fait l'objet de pressions et de menaces. Désormais, je dors mieux, mais je pense toujours à ce qui s'est passé, en particulier quand il y a un drame lié à la violence dans les stades, comme ce week-end."

D'après ses dires, l'agent de police n'a jamais eu pour habitude de brandir son arme. Le cas ne s'était même produit qu'une fois dans sa carrière avant la tragédie: "J'avais déjà sorti mon arme une fois, lorsque j'étais adjoint de sécurité. Cela s'est passé à la Foire du Trône : un jeune était en train de se faire frapper par d'autres. Je me suis interposé. Les jeunes ont sorti des couteaux. J'ai alors montré mon arme, ce qui avait eu, cette fois-là, un effet dissuasif."

Je me suis dit : je vais scander "allez PSG"

Antoine Granomort revient ensuite sur le jour du drame. Il affirme ne pas avoir ressenti de tension particulière ce soir-là : "Avant la fin du match, j'ai téléphoné à ma femme pour lui dire que c'était calme. Je n'ai rien senti venir. J'étais dans ma voiture. J'écoutais la radio pour suivre la rencontre."

Il relate ensuite les minutes qui ont précédé l'incident : "Dix minutes après le coup de sifflet final, un groupe de cinquante jeunes s'est retrouvé devant l'église, porte de Saint-Cloud. Ils ont commencé à lancer des objets sur les CRS et à les injurier. Je suis alors sorti de mon véhicule sérigraphié. J'ai mis mon écharpe, mon bonnet car j'aime le football et le PSG. Voyant le groupe avancer vers moi, je me suis dit : je vais scander "allez PSG !". Je me sentais plus en sécurité à l'extérieur du véhicule que seul à l'intérieur. J'ai vu alors un petit jeune courir devant moi..."

J'entendais : "Sale juif, sale nègre, la France aux Français, Le Pen président..."

Puis survient l'anicroche, déjà détaillée dans le dossier judiciaire publié par "L'Equipe Magazine", le 27 janvier dernier : "Une vingtaine de personnes couraient derrière ce jeune d'origine juive. Il était encerclé. Je me suis alors interposé entre lui et les jeunes du PSG. Je lui disais : "Reste derrière-moi. Je suis policier." J'avais ma bombe lacrymogène à la main. Je disais aux supporters : "Reculez !" Mais ils ne bougeaient pas. Le groupe est devenu plus imposant. Ils se sont retrouvés à un mètre de moi. J'ai alors donné un coup de lacrymogène. Je ne m'étais jamais servi de ma bombe et elle s'est vidée totalement d'un seul coup. Il y a eu un petit nuage jaune, qui est retombé sur le sol... Ils se sont de nouveau avancés vers moi. Au loin, je voyais une petite lumière bleue, celle du gyrophare de collègues qui ne bougeaient pas. J'ai alors sorti mon arme. Je tenais les supporters à distance mais ils avançaient de plus en plus. Ils brandissaient des ceintures et lançaient des insultes. J'ai continué à reculer. Ma radio de service ne fonctionnait pas."

Réduit jusqu'à ce moment à des paroles, fussent-elles injurieuses, l'incident prend une nouvelle tournure en se répercutant dans les actes : "Un premier coup m'a fait chuter sur le côté gauche. Un deuxième sur le flanc, puis un sur la tempe ont fait tomber mes lunettes. Le temps que j'essaie de les ramasser et de revenir dans l'axe, j'ai vu un individu se jeter sur moi, puis d'autres. J'ai effectué un tir de riposte pour me dégager. On s'est réfugiés dans le McDo. J'entendais : "Sale juif, sale nègre, la France aux Français, Le Pen président...", des cris de singes. Ils ont fait exploser les vitres. Je suis monté à l'étage. J'ai emprunté un portable pour appeler mon service. Les renforts sont enfin arrivés."

J'aurais préféré lui donner une bonne raclée

Concernant l'homicide, Antoine Granomort plaide la légitime défense. Il affirme qu'il ignorait avoir atteint quelqu'un lorsque le coup de feu a été tiré : "Ce sont les policiers qui m'ont appris qu'il y avait un mort et un blessé grave. Je me suis effondré. J'ai pleuré comme un gamin. Je voulais péter la vitre qui était devant moi. Je me disais : "C'est pas possible, ce n'est pas moi.""

Le policier explique ensuite l'état d'affliction dans lequel il s'est retrouvé à la suite du drame : "Lorsque j'étais en garde à vue, j'ai pensé me pendre. J'avais fait mon métier et je me retrouvais privé de liberté, seul dans une cellule, sous une lumière de 3 000 watts. Je pensais à la famille de ce jeune homme : il était trop jeune pour partir. J'aurais préféré l'avoir face à moi sur un tatami et lui donner une bonne raclée...

Regrettant aujourd'hui les conséquences de son acte, l'agent rejette cependant l'idée qu'il ait pu tuer un homme délibérément : "Je veux dire aujourd'hui à ses parents que je suis désolé que leur fils se soit trouvé sur le chemin de ma balle. J'ai conscience de leur douleur. J'aimerais le leur dire en face. J'espère qu'ils me pardonneront un jour..." Il assume son geste : "Aurais-je du tourner la tête à la vue du jeune ou me laisser frapper ? J'agirais aujourd'hui de la même manière, mais je sortirais ma carte de police, qui était au fond d'une sacoche et que je n'ai pas pu sortir." "Ce coup de feu m'a sauvé la vie et celle de Yaniv."

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