Quantcast

Leclub PSG : Les dessous d’une transaction à la hussarde

Publié le 09 Mai 2007 à 15h39 par Ludovic FRANCISCO
Leclub  PSG : Les dessous d’une transaction à la hussarde
De la première offre formulée par Luc Dayan pour racheter le PSG aux premières déconvenues essuyées par les nouveaux actionnaires, la dernière vente en date du club n'a pas été de tout repos. Dans son dernier numéro, "L'Equipe Magazine" revient sur cette opération qui tend à prouver qu'au PSG, rien ne se passe jamais comme ailleurs...

Décembre 2005 : on ne se bouscule pas au portillon pour acheter le PSG

Alors que le PSG est, fin 2005, pris dans la nasse d'une enquête judiciaire qui porte sur des dizaines de transferts suspects et pointe directement ses responsabilités, Canal + décide de rompre le cordon. La chaîne lance le "Projet Lutèce" et mandate la Banque Lazard pour trouver un acheteur. Son vice-président, Matthieu Pigasse, 38 ans, banquier d'affaires très courtisé, se saisit du dossier. Un document de vente signé du cabinet Price Waterhouse Coopers prévoit à l'issue de l'exercice 2005-2006 une perte de 1,8 million d'euros. Une analyse très optimiste qui suscite des commentaires moqueurs. Bernard Tapie déclare : "Si Canal + arrive à vendre le PSG, je m'appelle Bernadette." Et pour cause, malgré la victoire en Coupe de France, le PSG affiche en fin de saison une perte de 13,45 millions.

Janvier 2006 : Luc Dayan fait une offre sérieuse

Pigasse contacte alors Luc Dayan, ex-actionnaire de Lille et candidat au rachat du PSG à deux reprises dans le passé. Consultant pour le club Al-Saad de Doha, propriété de la famille de l'émir du Qatar, il est proche en outre du prince Jassem, fils de l'émir. En deux mois, Dayan va réunir 40 millions d'euros de fonds propres. 25 millions proviennent d'un fonds qatari derrière lequel se trouve le prince Jassem, qui doit prendre 40 % des actions de la future holding Grand Paris Sportif (GPS). Un groupe d'investisseurs français et la banque Morgan Stanley complètent le tout. C'est une affaire qui roule. Une signature est programmée au 29 mars 2006.

Bazin fait son apparition et propose un nouveau centre d'entraînement

Pendant ce temps, d'autres investisseurs se renseignent discrètement. C'est le cas de Sébastien Bazin, PDG de Colony Capital. A 45 ans, il vient d'entrer dans le capital du groupe Carrefour. Il "est considéré dans le monde de l'immobilier comme un virtuose de la finance, un homme extrêmement inventif", affirme la magazine. Il ne tarde pas à rencontrer Charles Beigbeder, PDG de Poweo, premier opérateur français de gaz et d'électricité. Toutefois, le PSG n'intéresse pas encore Bazin. Ce qu'il veut, c'est le Parc des Princes. Et pour cause, la société qui gère le stade appartient à la même holding que le PSG. Quoi qu'il en soit, la rencontre n'aboutit pas. Cela ne décourage pas Bazin qui lance son fonds d'investissement, Colony Capital, dans le montage financier d'un nouveau centre d'entraînement pour le PSG. Il n'en est pas à son premier essai puisqu'en 2004, la branche asiatique de Colony Capital a acheté un stade de baseball, à Fukuoka (Japon).

Février 2006 : Bazin rencontre Delanoë

Bazin ne perd donc pas espoir de s'emparer de l'enceinte sportive. "Il a identifié le potentiel que recèle l'exploitation d'installations sportives et le levier qu'offre un stade sur l'aménagement urbain environnement", affirme le journaliste de "L'Equipe". Aussi se fait-il introduire par Philippe Baudillon, PDG de Stadia Consulting (société qui cherche des investissements financer et exploiter des stades), auprès de Bertrand Delanoë. Tous deux savent combien le maire de Paris peut être un soutien de poids pour accréditer leurs projets autour du Parc.

Mars 2006 : le projet immobilier herculéen de Bazin prend forme

Bertrand Delanoë est charmé. L'idée d'un stade polyvalent (rassemblant foot et rugby), d'une offre de services (hôtels, restaurants, etc.) et surtout d'une refonte du quartier (création de bureaux et de logements) l'emballe. Cependant, l'entreprise est risquée. Et pour cause, elle ne repose sur rien ! "Selon des experts de l'immobilier, Bazin investit toujours dans des immeubles "en blanc", c'est-à-dire sur plans, affirme "L'Equipe Magazine". Il prend des risques et est rémunéré à leur mesure. Même si Colony se désengageait du PSG avant la réalisation de ses projets, autorisations et droits à construire en poche, il pourrait donc vendre grassement."

Le dossier Dayan prend du plomb dans l'aile

Mais pour personnifier et crédibiliser son offre, Bazin cherche un homme du sérail footballistique. Il pense d'abord le trouver en la personne de Michel Moulin, ex-président du Red Star, proche de Luis Fernandez et directeur de "Paru Vendu". Puis il jette son dévolu sur Alain Cayzac. Contacté, celui-ci rejette la proposition. En effet, l'offre de rachat de Luc Dayan, très avancée, semble sur le point d'être conclue. Toutefois, Cayzac conseille à Bazin de se joindre à la table des actionnaires réunis autour de Luc Dayan. Malheureusement, après avoir pris un très bon départ, le dossier de ce dernier essuie un coup d'arrêt. "Un détail juridique dans la rédaction de la lettre d'engagement des Qataris oblige à reporter la vente, à trois heures de la signature" prévue le 29 mars, raconte "L'Equipe Mag".

Canal + change son fusil d'épaule

Malgré tout, Bazin fait parvenir sa lettre d'engagement, le 4 avril 2006, pour 10 millions d'euros. Les 16 % de GPS restent à attribuer. Le lendemain, la presse met en lumière son implication, ce qui met l'homme d'affaires hors de lui. Celui qui voulait opérer le rachat en toute discrétion voit son opération s'ébruiter. Voyant que les investisseurs qataris tardent à se manifester pour éclaircir leur position, Bazin menace Canal + de quitter la table de négociations. Bertrand Méheut et Matthieu Pigasse lui demandent s'il est prêt à devenir seul investisseur. Banco.

Bazin emporte la mise au nez et à la barbe de Dayan

Comme un dernier coup porté à Dayan, Bertrand Delanoë déclare à la presse, un brin xénophobe, se méfier des "capitaux exotiques". Dayan contre-attaque : il assure que son groupe d'investisseurs français est désormais prêt à compenser les 25 millions d'euros promis par les Qataris. Canal + pense à un coup de bluff. Bazin, de son côté, lâche le navire et convainc la banque Morgan Stanley de le suivre. Convaincu d'avoir été floué, Dayan menace de porter l'affaire devant les tribunaux. On le comprendrait à moins. Charles Talar, administrateur du PSG, affirme : "Dayan a été le dindon de la farce ! C'est lui qui a monté tout le dossier, à la virgule près. Ceux qui ont repris le club l'ont utilisé pour monter le leur."

Tout cela n'émeut pas outre mesure Bazin qui affirme que l'apport des fonds qataris était une condition sine qua non à son engagement.

Les négociations entre Bazin et Canal + aboutissent

Pour compléter les négociations, Canal + réclame encore quelques garanties. Un président compétent tout d'abord. Ce sera Alain Cayzac, historique du Paris Saint-Germain et connaissant parfaitement la maison. Deuxième exigence : au moins un investisseur français. Ce sera Walter Butler. En plus d'être riche, il est fana de football. D'ailleurs on le dit supporter de Botafogo, le fameux club brésilien. Sauf qu'une fois assis à la table des négociations, Butler sera impitoyable, marchandant le prix du club. Celui-ci sera bloqué à 26 millions d'euros, auxquels il faut ajouter 15 millions de dette.

La saison 2006-2007 refroidit les actionnaires

Ce rachat effectué à la hussarde va rapidement trouver ses limites. Conservateur, Cayzac s'appuie sur la victoire en Coupe de France pour convaincre les actionnaires de conserver les staffs administratif et technique en l'état, ainsi que l'effectif. Sauf que la première saison ne tarde pas à se transformer en cauchemar : il y a d'abord le départ manqué, puis l'affaire Dhorasoo. Vient ensuite le licenciement de l'entraîneur Guy Lacombe puis la menace de relégation. Sans parler du décès d'un supporter, le 23 novembre 2006. Un incident qui tombe au moment où le PSG s'apprête à procéder à une augmentation de capital de 30 millions d'euros, grâce à de nouveaux investisseurs. Le nouveau centre d'entraînement, censé s'installer dans la commune de Plaisir, se heurte quant à lui aux riverains de la plaine forestière qui font annuler le projet.

Bazin a revu Dayan pour monter un projet plus solide

Le dossier a-t-il été monté et conclu à la hâte ? Pour Michel Seydoux, le président du Losc, cela ne fait aucun doute : "Peut-être qu'ils n'ont pas étudié le dossier comme ils auraient du. Si je n'avais pas passé un an dans le pénombre du Losc, je n'en aurais jamais pris la direction", déclare-t-il à nos confrères. Dans un entretien que vous avez pu lire sur notre site (http://www.planetepsg.com/news-6752-leclub_club_bazin_trop_de_chefs_dans_la_cuisine.html), Bazin reconnaîtra plus tard son erreur initiale. "Je me suis laissé bercer par la victoire en finale de la Coupe de France contre l'OM. Je n'ai pas vu la réalité." Ironie de l'histoire : le 31 janvier dernier, Sébastien Bazin a rencontré secrètement Luc Dayan. Avouant un problème de "gouvernance et de finances", il lui a proposé d'oublier le passé et de rédiger, moyennant 50 000 euros, une note sur tout ce qui n'a pas fonctionné depuis le début de la saison, tout en cherchant de nouveaux investisseurs ! Il est vrai que cette saison de transition a couté 11 millions d'euros au club. Dayan avait provisionné 8 millions pour le même résultat.

Vers un départ d'Alain Cayzac ?

D'après "L'Equipe Mag", cette rencontre en haut lieu présagerait peut-être le départ d'Alain Cayzac. Butler en serait le principal responsable. Non seulement parce qu'il pense que l'actuel président n'est pas à la hauteur, mais aussi parce qu'il brigue tout simplement sa place. "Présent à chaque match, Butler note tout, veut tout savoir et ne dédaigne pas de humer la moiteur des vestiaires. Sa présence devient si envahissante qu'on lui prête, au sein du club, l'intention de s'installer dans le fauteuil présidentiel", affirme l'hebdomadaire. De son côté, Bazin soutient fermement Cayzac. Une descente en L2 n'hypothèquerait pas son avenir. Mais Bazin n'est pas seul et il faudrait être naïf pour penser que la place qu'occupera le PSG en fin de saison n'aura pas une incidence sur le sort du président en exercice...

Lire les 00 commentaires
Commentaires