Qu'est-ce qui vous intéressera dans une interview ?
D'éviter la langue de bois chez les joueurs ! Si c'est pour entendre encore une fois « je suis au service de l'équipe », « seule la victoire est belle... », que ce soit pour les lecteurs ou pour moi, ce n'est pas la peine. Non, j'essaye de les amener à me parler d'autre chose. Pas forcément de foot d'ailleurs. Parfois on évoque ce qu'ils aiment dans la vie, ce qu'ils pensent de telle ou telle chose. Mais même dans une interview axée football, j'essayerai toujours d'apporter ce petit plus propre à la presse magazine, en trouvant l'info que l'on n'a jamais lue ailleurs. Au bout du compte, tout dépend des joueurs : certains vont se lâcher, alors que d'autres, très formatés, vont se cantonner à un discours convenu. Disons qu'avec quelques uns, on aura beau poser toutes les questions que l'on veut, on n'aura pas forcément beaucoup de réponses originales. Surtout qu'au PSG, les joueurs font très attention à ce qu'ils disent. Mais un joueur comme Jérôme Rothen garde ce côté spontané et naturel, une interview avec lui est toujours un moment privilégié.
Pratiquement, pour ces entretiens, vous reprenez les propos tenus lors des conférences de presse ?
Non. Toutes les interviews du magazine sont des entretiens individuels. Il n'est pas question de ressortir ce qui a déjà été écrit à droite ou à gauche, ou encore ce qui s'est dit dans une conférence de presse où tout le monde était déjà présent. J'assiste aux conférences de Paul Le Guen, avant et après match, mais reprendre intégralement ses discours n'apporterait pas grand-chose puisque c'est lié au résultat d'une seule rencontre, et déjà paru partout. Et puis cela ne suffit pas : aller au Camp des Loges, aussi, est très important. Même si je n'ai pas d'interview à faire. J'en profite pour discuter avec les joueurs de manière informelle, garder le lien. C'est du relationnel. J'y vais au moins une fois par semaine. Parfois deux, ou trois fois, ça dépend de ce que je dois y faire.
A combien d'exemplaires tirez-vous ?
On tire à environ 40 000 exemplaires. En moyenne, nos ventes se situent entre 15 000 et 20 000 exemplaires. Cela peut être plus, si le PSG cartonne en championnat et aussi en période de transferts.
Et si les résultats sont mauvais ?
Si le PSG est au fond du trou, pour nous aussi c'est mauvais ! Il y a un lien direct entre les ventes et les résultats du club.
Une crise ne fait pas vendre ?
Non, pas forcément. Mais c'est un peu une volonté de notre part : s'il y a une crise, on n'en tirera pas parti pour balancer des choses pas clean. Si d'autres ont besoin d'une petite crise de temps en temps pour vendre, nous, on a fait un autre choix. On sait que balancer des choses nous attirera dans l'immédiat un gros lectorat, oui. Mais à terme... Bon, on n'est pas non plus le magazine officiel : quand ça ne va pas, on le dit. Il faut que l'on garde notre indépendance. Mais quand le club est mal, il ne sera pas question d'en rajouter. On sait que l'on est lu par des supporters, alors il n'est ni question de biaiser une information, ni de surjouer. On veut rester le plus proche possible de ce qui se passe vraiment.
Mais vous n'avez pas de pression, venant d'en haut, pour tailler le club de temps en temps ?
Au départ on a pu le ressentir un peu comme ça. Pour le magazine, quand des choses ne vont pas au Paris Saint-Germain, même si je suis attachée à ce club, je le dis quand même. Mais je ne le ferai jamais de manière gratuite. On veut que Le Foot Paris respecte une éthique.
Mais en tant que supportrice, vous n'êtes pas partagée ?
Un journaliste se doit d'abord d'être objectif. Je pense l'être, en tout cas je fais tout pour. Si je critique, ce sera toujours en argumentant. Par exemple dans notre dernier numéro, j'ai interviewé Jean-Michel Moutier à propos du recrutement estival de Paul Le Guen. Ses propos ne vont pas dans le sens du club, et je ne vois pas pourquoi je les aurai retirés. Par rapport à son passé de directeur sportif du PSG, j'ai jugé intéressant de recueillir ses impressions. Je l'ai fait en ce sens et non en me disant : « Super, il va balancer ».
Pourquoi avoir mis Kaká en couverture l'été 2006 ?
A ce moment-là, au moment de l'arrivée des nouveaux actionnaires, un salarié du PSG nous avait confié que les nouveaux actionnaires souhaitaient réaliser un gros coup, et que le nom de Kaka avait circulé. Il avait déjà été approché par l'intermédiaire de Raí. Il ne faut pas non plus oublier qu'il avait failli signer à Paris avant de signer à Milan. Bref l'info nous est parvenue pile au moment où on bouclait. On s'est réunis en urgence et finalement on a décidé de prendre le risque de mettre cela en une...
Résultat ?
Ce numéro là s'est très bien vendu, c'est sur. Mais juste après, Kaká déclarait publiquement que Milan était le club de son cœur. Alors ensuite, question crédibilité... Pour nous au départ c'était un beau pari. Le problème est que notre périodicité n'est pas l'idéale pour les transferts. Pour des joueurs comme Landreau, Digard, Traoré, Bourillon, nous étions au courant avant que ne sortent les premières rumeurs, c'est extrêmement frustrant de se voir "doubler" par d'autres supports, en attendant que notre magazine sorte... Pour Gallardo, l'information m'a été communiquée alors que personne n'en n'avait parlé en France. Et quand on est sorti, c'était trop tard... C'est rageant.
On sent une évolution dans votre manière de faire les couv.
Oui, on a muri, on a gagné davantage de confiance auprès des joueurs, des lecteurs, du monde du foot... On s'est installés, et avant tout on veut rester crédible, et non plus faire des coups. On a mis du temps à nous forger cette légitimité. Il m'arrive d'être invitée sur RTL dans l'émission "RTL FOOT". Le magazine est de plus en plus connu, reconnu dans le milieu mais il nous faut encore faire nos preuves.
Dans quelle mesure ?
Notre problème c'est aussi un problème d'exposition : on n'a pas les même moyens que de grosses machines comme France Football ou Onze Mondial alors c'est vrai que si tu ne connais pas Le Foot Paris, tu auras du mal à tomber dessus par hasard en kiosque. C'est ça qui est dommage. D'autant que d'autres magazines ont un nom très proche du nôtre et que parfois des lecteurs font l'amalgame, alors que le contenu est très différent, je crois.
Justement, où se situe la différence d'après vous ?
Pas au niveau du prix : on est à 3,95 €, comme les autres. Concernant la qualité du papier, j'aimerais que l'on puisse faire mieux... mais on essaie de se rattraper niveau contenu. Avoir tous les mois la chronique de Nicolas Anelka, l'un des joueurs les plus rares à s'exprimer dans les médias, c'est une reconnaissance de notre travail. Cette confiance que l'on essaie d'instaurer entre les joueurs et nous, entre nos lecteurs et nous n'est pas feinte. On veut se tenir à ça.