Publié le 14 Avril 2008 à 17h31 par Baghib!
Dimanche soir, le jeune Mamadou Sakho a retrouvé le banc de touche, trois matches après l'avoir quitté pour suppléer Mario Yepes, blessé au mollet contre Lyon. Trois matches du haut de ses dix-huit ans, pour trois prestations que le seul qualificatif "prometteuses", convenu lorsqu'il s'agit de parler d'un jeune, décrirait bien injustement. Le tout juste majeur défenseur central a en effet montré une solidité et une force de caractère impressionnantes, à un poste intransigeant où la moindre erreur peut être fatale. Ce qui n'a pas empêché le journal "Le Parisien" de lui consacrer samedi un article que nous qualifierons sobrement de nauséabond, minimisant ses performances et lui conférant une arrogance qui irriterait "en interne".
Nombreux étaient ceux qui craignaient le remplacement de Yepes par le jeune Mamadou Sakho, tant confier un poste à grande responsabilité à un joueur de dix-huit ans, qui plus est dans une période aussi critique, semblait risqué. Le Guen, lui, lui a fait confiance. Les prestations du jeune défenseur central lui ont donné raison : plus à l'aise qu'en position d'arrière-gauche, Sakho a réussi à faire oublier l'absence du Colombien, qui restait pourtant sur de bonnes performances avant sa blessure.
Le mérite du plus jeune capitaine de l'histoire du Paris Saint-Germain est d'autant plus grand que les circonstances étaient loin d'être favorables : la situation du club en championnat semblait peu propice au lancement de jeunes, et, d'un point de vue personnel, Sakho avait eu le malheur de marquer contre son camp à Rennes, fait de jeu que l'on peut penser difficile à surmonter pour un joueur de dix-huit ans. De plus, Sakho dut, après avoir remplacé Yepes en cours de match à Lyon, rentrer directement dans le grand bain, en étant aligné en finale de la Coupe de la Ligue face à Lens. Cela ne le perturba pas, et il contribua activement à l'acquisition de la première ligne de son palmarès professionnel. Sans que cela paraisse exceptionnel. Peu de joueurs auront pourtant disputé (et remporté) une finale devant quatre-vingt mille personnes à son âge, qui plus est au poste de défenseur central.
Après cette victoire, Sakho confirma avec de nouvelles prestations solides face à Strasbourg et à Nancy, semblant prendre de plus en plus d'assurance dans son jeu balle au pied. Clairement, le seul terme "prometteur" est réducteur pour le jeune parisien, qui a durant son intérim enchaîné des prestations largement au niveau de la Ligue 1. Cela n'a pourtant pas semblé suffire aux employés du journal "Le Parisien", celui-ci ayant samedi consacré un article au jeune défenseur central, intitulé "Sakho, un intérim contrasté".
Si nous ne connaissons pas l'état des relations entre Sakho et les "journalistes", il est difficile de ne pas lire en cet article un règlement de compte, peut-être après une interview refusée. Le journal commence par minimiser les performances du jeune de dix-huit ans, dans une argumentation que les plus abjects sophistes ne renieraient pas. Tout en reconnaissant un bilan sportif positif et prometteur (sic), l'auteur prend le temps de mettre en défaut la prétendue conviction de l'entourage de Sakho qu'il s'agit d'ores et déjà du meilleur défenseur parisien, parlant de "quelques faiblesses dans son placement" et d'"une concentration sur quatre-vingt-dix minutes laissant à désirer", ainsi que d'une "responsabilité engagée" sur les buts de Lens et Nancy.
Prendre l'apparence de l'objectivité dans un discours flatteur pour mettre en avant les reproches adressés, voilà une noble attitude de journaliste. Il n'est alors plus choquant, à ce niveau, de tromper ouvertement son lectorat, tout en se protégeant par une formulation vague de "responsabilité engagée". Car si Sakho fut effectivement un peu court sur le but de Carrière au Stade de France, le blâmer pour le but encaissé à Nancy semble tenir de l'acharnement.
Conscient que les performances du jeune défenseur central l'interdisent sans doute d'en rajouter sur son bilan sportif, le journal passe donc à un paragraphe d'attaques sur son comportement. Dès lors, les jugements fusent. Peut-être vexé de s'être vu refuser une interview, l'auteur condamne sans appel le choix de Sakho de ne pas trop s'exprimer dans les médias. Selon lui, il s'agit d'une "anecdote révélatrice" d'un "comportement à revoir".
Fidèle à sa tradition de "source interne au club ayant préféré garder l'anonymat", Le Parisien se permet d'annoncer par ailleurs que "certains cadres croient déceler de l'arrogance dans [le] comportement [de Sakho]", attaque masquée d'une précision dont on vante sans doute encore les mérites dans les meilleures écoles de journalisme. Le choix du joueur de rester discret en termes de sorties médiatiques, choix assumé comme nous le verrons, dépasserait ainsi la simple atteinte à l'orgueil des journalistes en quête de déclarations : désormais, Sakho devra dissiper "le malentendu qui s'est installé avec certains de ses partenaires".
Quelle que soit la rancœur du journal envers le joueur, ce type d'article, partisan, aigri et au final modèle de désinformation, est plus que regrettable, surtout lorsqu'il prend pour cible un jeune de dix-huit ans formé au club, ayant réalisé d'excellentes prestations sous le maillot parisien (en espérant en voir d'autres à l'avenir), et semblant garder un bon état d'esprit malgré la médiatisation inhérente à l'arrivée d'un jeune en haut de l'affiche.
Car il ne faut pas oublier que ce que Le Parisien lui reproche avec tant de véhémence est une démarche réfléchie de la part du jeune joueur, après l'agitation qu'avaient provoquée la titularisation de nombreux jeunes et son port de brassard à Valenciennes, agitation qui l'avait perturbé, comme il l'avait déclaré il y a quelques semaines : "Toute cette surexposition m'a mis mal à l'aise. Nous, les jeunes, on a encore beaucoup à prouver, on doit rester sobres et humbles, c'est pour ça qu'on parle peu aux journalistes." Une décision et une attitude que nous trouvons sages, n'en déplaise à ceux directement concernés par ce déficit en déclarations.
Entendons-nous : il n'est nullement question ici de dresser un portrait idéaliste du joueur, ou d'exiger dès à présent un poste de titulaire l'an prochain, aux côtés de Camara. Mais comment ne pas espérer le voir confirmer sous le maillot parisien tout ce qu'il a laissé entrevoir durant ces trois matches, à seulement dix-huit ans ? Et surtout, comment s'en prendre aussi vilement à un joueur de son âge, formé au club, et ayant toujours répondu présent lorsque l'on a fait appel à lui, sans donner l'impression d'en rajouter dans les médias ?
Puisse donc Sakho continuer à travailler sereinement, en espérant le revoir à l'avenir aligner des prestations aussi "contrastées" (re-sic), et défendre fièrement les couleurs Rouge et Bleu, comme il l'a fait depuis de nombreuses années dans les catégories de jeunes.